Désemparé, ne sachant comment s’y prendre, il faillit abandonner. Plus il avançait vers la porte, moins ses jambes le supportaient. C’est ce qui lui donna l’idée au moment où il mettrait les pieds dans la carlingue, il feindrait un malaise. Le temps qu’un médecin arrive pour l’ausculter, le secrétaire de l’ambassade aurait le temps d’intervenir auprès des autorités. On s’affairait autour de lui, un docteur l’examinait consciencieusement, quand soudain un homme arriva en trombe du tarmac, monta les escaliers de l’échelle de coupée, criant à tue-tête le nom de Thierry Thiebault.

• C’est moi, se présenta Thierry qui se releva comme si rien ne s’était passé.

On lui demanda de suivre des deux autres personnes qui suivaient de près le chef de la sécurité de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle.

Dans le bureau de la police des frontières, puis dans celui du directeur de l’aviation civile, Thierry compléta ce qu’il savait aux dires que le secrétaire de l’ambassade de France avait succinctement exposés. Il fallait surtout retenir le vol AF2124. Le ministère des Affaires Etrangères avait confirmé trois minutes plus tard l’infection de typhoïde des représentants de quinze pays, et pas des moindres. Le ministère de la Santé apporterait les vaccins

dans une glacière, dans une quarantaine de minutes et l’avion reliant la France au Portugal pourrait reprendre sa route.

• Même si je prends ce vol avec les vaccins, je ne serais pas avant dimanche soir à São-Tomé. Pouvez-vous appeler le secrétaire de l’ambassade pour savoir où ils en sont ?

La communication fut établie.

• Pas réjouissant. Certains malades accusent le coup d’une diminution artérielle, d’une altération du faciès et d’une extériorisation du sang plus ou moins noir.
• Quarante-huit heures de délai, c’est peut-être trop long ?
• Sûrement.
• Pouvez-vous demander aux américains d’intervenir. Avec leurs moyens. suggéra Thierry. Ils peuvent dépêcher un avion militaire et vous auriez les médicaments dans la matinée.
• J’en parle et je vous rappelle.

Effectivement le téléphone sonna au bout de cinq minutes.

• Les Américains ont fait décoller un avion militaire de leur base d’Allemagne. Ils ont eu l’autorisation de survoler la France et de se poser à Roissy pour repartir avec la glacière aux médicaments. Il y a quand même un hic.
• Lequel ?
• Vous ne serez pas du voyage.
• Je m’en doutais un peu. Je vais prendre le vol régulier. A dimanche dix-neuf heures, heure locale.

Tout allait pour le mieux. Les autorités portuaires ordonnèrent que le vol de Lisbonne soit effectif immédiatement. Thierry Thiebault gagna sa place près d’un hublot.