10 mars 2021

Jeudi 20 septembre 1984

Un engin de chantier réveilla Maximin en sursaut. Une pelleteuse venait d’arriver et deux hommes à forte voix analysaient le travail à effectuer. Sur le qui-vive pratiquement toute la nuit, il avait très peu dormi. Il se leva en attrapant la musette et se cacha derrière une palette de briques, avant de quitter la demeure. Il scruta une dernière fois la pièce cherchant des yeux Mimy. Pas de Mimy à l’horizon. Il fallait qu’il déguerpisse. Il profita du bruit de la pelleteuse pour reprendre son chemin.

• Adieu Mimy, heureux de t’avoir connu, dit-il déçu.

Au lieu de prendre le chemin de Saint-Michel-en-Beaumont, il décida de retourner au cœur du village. Il lui fallait s’approvisionner.  Le reste du pain serait très rassis en fin de matinée. Au moment d’entrer dans la boulangerie, il réalisa qu’il n’avait pas le moindre argent sur lui. Ses parents ne lui avaient jamais donné d’argent de poche. C’était la catastrophe. Il n’avait pas pensé quand il planifia sa disparition à cette éventualité. Il serait donc contraint de faire la manche. On était Jeudi et s’il voulait se faire un peu d’argent il fallait attendre dimanche pour se placer à l’entrée de l’église du village. Soudain il pensa à sa mère qui dans la semaine allait au cimetière juxtaposant l’église, sur la tombe de son père. Il tenta sa chance en se dirigeant vers le lieu du culte. Il était de bonne heure. Les ouvriers du bâtiment avaient pris leur service à six heures, aussi pour passer le temps avant que ne se présente une éventuelle grenouille de bénitier, il se posa sur une pierre devant l’église. Il regardait avec attention l’édifice et entreprit de dessiner la porte encore fermée. Il posa sa musette sur ses genoux, plongea la main gauche à l’intérieur et chercha son cahier. Il toucha une forme indéfinie et retira vivement sa main. Prudemment il ouvrit le rabat et contre toute attente vit Mimy qui le regardait droit dans les yeux.

• A c’est toi Mimy. Qu’est que tu fais là ?

La souris pendant la nuit, au plus fort de l’assoupissement de Maximin avait tenté de se restaurer. Elle avait réussi à entrer dans la musette, mais s’était trouvé piégée quand Maximin avait changé de position dans la nuit. Mimy ne chercha pas à fuir. Amoureusement il posa son index sur le dos de l’animal et le caressa lentement. Elle ne bougeait pas.  Il se dit qu’il ne l’avait en rien de temps apprivoisé et dit.

• Tu restes avec moi ?

Elle semblait acquiescer.

• Alors si tu veux, je te laisse sortir. tu te balades pour te dégourdir et tu reviens avant que je parte. Ok ?

Maximin l’attrapa délicatement et la posa sur le sol en latérite. Elle ne devait pas peser plus de trente-cinq grammes. Maigrichonne pensa-t-il.  Elle le regarda de ses petits yeux de couleur indigo et lentement se dirigea vers un petit bosquet à quelques mètres.

Profitant que la musette était ouverte, il en sorti le cahier et le stylo qu’il avait inséré à l’intérieur. Il fixa la porte en bois massif de l’église et commença son dessin. Il se leva s’en approcha pour y reproduire un détail et contant de son esquisse il regagna sa place. Il s’étonna d’avoir un trait de crayon net et précis. A l’école de son village il n’avait jamais dessiné.